
Vendredi 7 juillet, 18 h 30
Amélie ne peut plus s’arrêter et tout en parlant elle a l’impression que cela prend forme. Elle fait de grands gestes, montre au commandant la plage, l’anse, les cheminées. Et l’une d’entre elle, la première, qui continue de fumer, elle en est certaine.
- Attends Amélie, je t’interromps, ils ont contacté l’université où elle est chercheuse, et ont donné son numéro de portable. On va appeler on ne sait jamais…
Amélie a déjà sorti son mobile. L’excitation monte. Il lui tend le carnet où il a inscrit le numéro. Elle le compose.
- Ça sonne commandant !
Le vent est violent mais ils sursautent tous les deux presque en même temps : ça sonne dans la voiture ! Enfin ça ne sonne pas vraiment, c’est une espèce de corne de brume très puissante qu’ils entendent nettement. Mais cela vient bien de l’intérieur de la voiture.
Ils se regardent. Amélie est convaincue que cela devient sérieux. Le commandant est plus pragmatique, il pense que comme souvent on cherche le pire alors que c’est le plus simple, l’évident qui devrait sauter aux yeux. Cette fameuse Valentine et ses totems est allée faire une exploration sous-marine un peu poussée.
- On va retourner aux Laurons et on va interroger les sauveteurs, ils ont peut-être vu quelque chose. On ne sait jamais.
Vendredi 7 juillet 18 h 50
Ils arrivent très vite plage des Laurons. Amélie aurait bien aimé que le commandant s’arrête vers une petite crique pour interroger un petit groupe de nageurs, à leur allure elle est persuadée que ce sont des habitués. Ils ont peut-être vu quelque chose. Mais le commandant veut en finir, c’est vendredi soir et les heures supplémentaires ce n’est plus pour lui.
Il est 18 h 50 et les maîtres-nageurs sauveteurs sont en en train de ranger le matériel. La surveillance s’achève à 19 h 00 mais en ce début juillet il n’y a pas encore beaucoup de touristes. Il faut reconnaître que « Les Laurons » n’ont pas un grand succès auprès de celles et ceux qui n’imaginent la plage que comme un lieu paradisiaque entourée de palmiers. En guise de palmiers, les quatre cheminées sont là, encore plus proches, et au large plusieurs cargos bouchent l’horizon.
Amélie aime immédiatement ce lieu.
Les trois pompiers sont assez surpris de l’arrivée du commissaire et de sa collègue. Ils regardent machinalement leurs montres, comme pris en faute. Le commissaire sourit intérieurement : il sait que dans le secteur de Martigues tout le monde le connait et encore plus toutes celles et ceux qui portent un uniforme. C’est assez jouissif d’inspirer une telle crainte, ou un tel respect, lui qui dans trois semaines passera l’essentiel de ses journées à pêcher ici ou ailleurs,
- Bonjour messieurs dames (deux pompiers et une femme pompière, comment dit-on déjà une pompière, décidément pompière, lieutenante, il est vraiment temps qu’il parte il est un peu perdu), est ce que vous avez constaté, ici sur la plage, ou ailleurs au large, quelque chose de particulier, d’anormal ?
C’est le plus âgé qui répond
- Vous savez commandant, il ne se passe jamais grand-chose ici. Et hier ce n’était pas la même équipe, seule Virginie était déjà là.
Il appelle Virginie qui est en train d’abaisser le drapeau vert signalant que la baignade est autorisée.
- Virginie, c’est la police, elle veut savoir si on a vu quelque chose de particulier, aujourd’hui ou hier. Rien de spécial hier ?
Virginie semble impressionnée ou plutôt intimidée.
- Pas grand-chose, vous savez…
- Oui on sait la plage est plutôt tranquille ; on nous l’a déjà dit, mais si vous dites « pas grand-chose », ça veut dire qu’il y a quand même un petit quelque chose ; essayez de vous souvenir. Vous n’avez vu personne au large qui aurait pu venir à la nage de la pointe de Bonnieu ?
- A la nage de la pointe de Bonnieu ! Ça fait quand même loin ! Pour une telle distance il vaut mieux avoir une combinaison, même en été…
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