La moitié et son double : 3

Le père n’est pas musicien, ne comprend pas grand-chose à l’anglais, mais ce qu’il aime avec ce chanteur c’est que tout devient simple. La musique, elle lui entre dans la tête sans poser de questions, sans chercher à se faire remarquer, sans chercher à ce qu’on prenne l’air sérieux pour en comprendre les portées.

Cette musique, surtout les morceaux acoustiques, on sent qu’elle est faite pour ceux qui n’obligent pas leurs émotions à prendre d’autres chemins que ceux qu’elles sont habituées à emprunter. Ce sont les mêmes chemins qu’à la lecture d’un passage de Steinbeck, de Camus, de Kerouac, ou d’Hemingway. Les paroles il ne les comprend pas toutes, contrairement à son fils qui est à l’aise avec l’anglais. Il ne les comprend pas toutes mais il les ressent, il sait qu’elles parlent, pour beaucoup d’entre elles, de ce qui est vrai.

Le fils lui connaît tout de ce chanteur, il est un passionné, pas un fan ; le mot ne convient pas pour décrire ce qui se passe chez lui quand il a les tripes secouées lors des nombreux concerts auxquels il a assisté. On parle de fans pour les autres, ceux qui reçoivent paroles et musiques avec passivité, comme des oies qu’on gave, lui il n’a pas la bouche ouverte, il laisse entrer les émotions, il les laisse naviguer dans l’arrière-pays de sa tête, alors elle rencontre ses autres passions, ses révoltes, ses indignations, ses doutes et ce qui se passe c’est plus que du plaisir, c’est autre chose. Les mots n’existent pas toujours pour décrire quand on sent un frisson qui parcourt l’échine, avec des picotements sur tout le corps et irrésistiblement des larmes qui montent, de ces larmes qu’on ne cherche pas à ravaler parce qu’elles sont le sang de cette vie qu’on a en soi, une vie qu’on ne retient pas, une vie qu’on laisse dire, qu’on laisse faire.

Le père il comprend bien cela, il éprouve aussi ces sensations quand il lit les premières pages de l’étranger, quand il lit et entend ce que dit Léo Ferré. Et lui non plus n’est fan de rien, parce que lui non plus n’aime pas cette réduction du fanatisme. Tous les deux ce qu’ils aiment par-dessus tout, c’est la vie, ses contrastes, ses simplicités, ce qu’ils redoutent, ce qu’ils ne supportent pas, c’est les fausses certitudes de celles et ceux qui prétendent savoir.

La moitié et son double, 2

Street Art sur le mur de Berlin

Il se souvient de cet homme. Il lui a proposé d’entrer avec lui, à l’intérieur, de s’asseoir doucement, d’écouter la portière qui claque, le craquement du mauvais cuir quand on s’assoit. Il lui a conseillé de fermer les yeux et d’attendre, d’entendre. Il  l’a pris pour un malade, pour  un original,  mais il est quand même entré. Il a fermé les yeux, vite, parce qu’il était pressé, et c’est vrai il s’en souvient : il était bien. Il pleuvait légèrement et les gouttes de pluie faisaient comme une mélodie, une espèce de mélancolie qui rappelle tant le blues qui navigue toujours entre le rire et les larmes.

Alors quand il les a vus arriver tous les deux, il s’est souvenu de son musicien et quand ils les a vus sentir l’intérieur des voitures il a su qu’il pourrait enfin vendre cette vieille Plymouth.

Il pourrait la vendre sans crainte, il respecterait sa promesse. Il est un peu superstitieux et chaque fois qu’il fait le tour de son parc, et qu’il s’approche de la carrosserie verdâtre il ne peut s’’empêcher de revoir le visage raviné du musicien qui ne voulait plus rouler dans cette carcasse récalcitrante.

Il leur explique qu’ils ne pourront pas en attendre grand-chose ; il explique qu’elle est solide, mais pas nerveuse il ne vaut mieux pas l’utiliser sur de petites routes sinueuses parce qu’évidemment elle n’a pas de direction assistée.

Peu importe, ce qu’ils veulent tous les deux c’est prendre la route, et aller le plus droit possible.

Ils expliquent. Ce qu’ils veulent, c’est rouler en se relayant pendant plus de 37 heures, c’est le cadeau qu’ils ont décidé de se faire, un cadeau dont ils sont à peu près les seuls à comprendre le sens.

Pourquoi trente-sept heures ? Parce que c’est à quelques minutes près la durée compilée de tous les disques de leur maître, de leur idole commune, de leur compagnon de rêveries de celui qui aurait pu conduire lui aussi cette voiture celui que les autres appellent le Boss.

Ils ont décidé simplement de s’offrir un voyage en voiture avec comme fonds musical tout ce que Bruce Springsteen a écrit, chanté, joué, simplement sur un lecteur de CD assez simple avec des vrais boutons qui tournent.

Au début ils avaient simplement décidé qu’il faudrait qu’ils fassent quelque chose, ensemble, autour de cette passion commune. Ils peuvent, ils s’en sont  souvenus l’un comme l’autre recevoir des bouquets d’émotions à l’écoute de  ces mélodies, avec pour envelopper la voix rauque, parfois plaintive de Bruce, le ronronnement d’un moteur et le glissement des essuie- glaces.

La moitié et son double : 3

Le père n’est pas musicien, ne comprend pas grand-chose à l’anglais, mais ce qu’il aime avec ce chanteur c’est que tout devient simple. La musique, elle lui entre dans la tête sans poser de questions, sans chercher à se faire remarquer, sans chercher à ce qu’on prenne l’air sérieux pour en comprendre les portées.

Cette musique, surtout les morceaux acoustiques, on sent qu’elle est faite pour ceux qui n’obligent pas leurs émotions à prendre d’autres chemins que ceux qu’elles sont habituées à emprunter. Ce sont les mêmes chemins qu’à la lecture d’un passage de Steinbeck, de Camus, de Kerouac, ou d’Hemingway. Les paroles il ne les comprend pas toutes, contrairement à son fils qui est à l’aise avec l’anglais. Il ne les comprend pas toutes mais il les ressent, il sait qu’elles parlent, pour beaucoup d’entre elles, de ce qui est vrai.

Le fils lui connaît tout de ce chanteur, il est un passionné, pas un fan ; le mot ne convient pas pour décrire ce qui se passe chez lui quand il a les tripes secouées lors des nombreux concerts auxquels il a assisté. On parle de fans pour les autres, ceux qui reçoivent paroles et musiques avec passivité, comme des oies qu’on gave, lui il n’a pas la bouche ouverte, il laisse entrer les émotions, il les laisse naviguer dans l’arrière-pays de sa tête, alors elle rencontre ses autres passions, ses révoltes, ses indignations, ses doutes et ce qui se passe c’est plus que du plaisir, c’est autre chose. Les mots n’existent pas toujours pour décrire quand on sent un frisson qui parcourt l’échine, avec des picotements sur tout le corps et irrésistiblement des larmes qui montent, de ces larmes qu’on ne cherche pas à ravaler parce qu’elles sont le sang de cette vie qu’on a en soi, une vie qu’on ne retient pas, une vie qu’on laisse dire, qu’on laisse faire.

Le père il comprend bien cela, il éprouve aussi ces sensations quand il lit les premières pages de l’étranger, quand il lit et entend ce que dit Léo Ferré. Et lui non plus n’est fan de rien, parce que lui non plus n’aime pas cette réduction du fanatisme. Tous les deux ce qu’ils aiment par-dessus tout, c’est la vie, ses contrastes, ses simplicités, ce qu’ils redoutent, ce qu’ils ne supportent pas, c’est les fausses certitudes de celles et ceux qui prétendent savoir.

La moitié et son double, 2

Street Art sur le mur de Berlin

Il se souvient de cet homme. Il lui a proposé d’entrer avec lui, à l’intérieur, de s’asseoir doucement, d’écouter la portière qui claque, le craquement du mauvais cuir quand on s’assoit. Il lui a conseillé de fermer les yeux et d’attendre, d’entendre. Il  l’a pris pour un malade, pour  un original,  mais il est quand même entré. Il a fermé les yeux, vite, parce qu’il était pressé, et c’est vrai il s’en souvient : il était bien. Il pleuvait légèrement et les gouttes de pluie faisaient comme une mélodie, une espèce de mélancolie qui rappelle tant le blues qui navigue toujours entre le rire et les larmes.

Alors quand il les a vus arriver tous les deux, il s’est souvenu de son musicien et quand ils les a vus sentir l’intérieur des voitures il a su qu’il pourrait enfin vendre cette vieille Plymouth.

Il pourrait la vendre sans crainte, il respecterait sa promesse. Il est un peu superstitieux et chaque fois qu’il fait le tour de son parc, et qu’il s’approche de la carrosserie verdâtre il ne peut s’’empêcher de revoir le visage raviné du musicien qui ne voulait plus rouler dans cette carcasse récalcitrante.

Il leur explique qu’ils ne pourront pas en attendre grand-chose ; il explique qu’elle est solide, mais pas nerveuse il ne vaut mieux pas l’utiliser sur de petites routes sinueuses parce qu’évidemment elle n’a pas de direction assistée.

Peu importe, ce qu’ils veulent tous les deux c’est prendre la route, et aller le plus droit possible.

Ils expliquent. Ce qu’ils veulent, c’est rouler en se relayant pendant plus de 37 heures, c’est le cadeau qu’ils ont décidé de se faire, un cadeau dont ils sont à peu près les seuls à comprendre le sens.

Pourquoi trente-sept heures ? Parce que c’est à quelques minutes près la durée compilée de tous les disques de leur maître, de leur idole commune, de leur compagnon de rêveries de celui qui aurait pu conduire lui aussi cette voiture celui que les autres appellent le Boss.

Ils ont décidé simplement de s’offrir un voyage en voiture avec comme fonds musical tout ce que Bruce Springsteen a écrit, chanté, joué, simplement sur un lecteur de CD assez simple avec des vrais boutons qui tournent.

Au début ils avaient simplement décidé qu’il faudrait qu’ils fassent quelque chose, ensemble, autour de cette passion commune. Ils peuvent, ils s’en sont  souvenus l’un comme l’autre recevoir des bouquets d’émotions à l’écoute de  ces mélodies, avec pour envelopper la voix rauque, parfois plaintive de Bruce, le ronronnement d’un moteur et le glissement des essuie- glaces.

La moitié et son double : 3

Le père n’est pas musicien, ne comprend pas grand-chose à l’anglais, mais ce qu’il aime avec ce chanteur c’est que tout devient simple. La musique, elle lui entre dans la tête sans poser de questions, sans chercher à se faire remarquer, sans chercher à ce qu’on prenne l’air sérieux pour en comprendre les portées.

Cette musique, surtout les morceaux acoustiques, on sent qu’elle est faite pour ceux qui n’obligent pas leurs émotions à prendre d’autres chemins que ceux qu’elles sont habituées à emprunter. Ce sont les mêmes chemins qu’à la lecture d’un passage de Steinbeck, de Camus, de Kerouac, ou d’Hemingway. Les paroles il ne les comprend pas toutes, contrairement à son fils qui est à l’aise avec l’anglais. Il ne les comprend pas toutes mais il les ressent, il sait qu’elles parlent, pour beaucoup d’entre elles, de ce qui est vrai.

Le fils lui connaît tout de ce chanteur, il est un passionné, pas un fan ; le mot ne convient pas pour décrire ce qui se passe chez lui quand il a les tripes secouées lors des nombreux concerts auxquels il a assisté. On parle de fans pour les autres, ceux qui reçoivent paroles et musiques avec passivité, comme des oies qu’on gave, lui il n’a pas la bouche ouverte, il laisse entrer les émotions, il les laisse naviguer dans l’arrière-pays de sa tête, alors elle rencontre ses autres passions, ses révoltes, ses indignations, ses doutes et ce qui se passe c’est plus que du plaisir, c’est autre chose. Les mots n’existent pas toujours pour décrire quand on sent un frisson qui parcourt l’échine, avec des picotements sur tout le corps et irrésistiblement des larmes qui montent, de ces larmes qu’on ne cherche pas à ravaler parce qu’elles sont le sang de cette vie qu’on a en soi, une vie qu’on ne retient pas, une vie qu’on laisse dire, qu’on laisse faire.

Le père il comprend bien cela, il éprouve aussi ces sensations quand il lit les premières pages de l’étranger, quand il lit et entend ce que dit Léo Ferré. Et lui non plus n’est fan de rien, parce que lui non plus n’aime pas cette réduction du fanatisme. Tous les deux ce qu’ils aiment par-dessus tout, c’est la vie, ses contrastes, ses simplicités, ce qu’ils redoutent, ce qu’ils ne supportent pas, c’est les fausses certitudes de celles et ceux qui prétendent savoir.

La moitié et son double, 2

Street Art sur le mur de Berlin

Il se souvient de cet homme. Il lui a proposé d’entrer avec lui, à l’intérieur, de s’asseoir doucement, d’écouter la portière qui claque, le craquement du mauvais cuir quand on s’assoit. Il lui a conseillé de fermer les yeux et d’attendre, d’entendre. Il  l’a pris pour un malade, pour  un original,  mais il est quand même entré. Il a fermé les yeux, vite, parce qu’il était pressé, et c’est vrai il s’en souvient : il était bien. Il pleuvait légèrement et les gouttes de pluie faisaient comme une mélodie, une espèce de mélancolie qui rappelle tant le blues qui navigue toujours entre le rire et les larmes.

Alors quand il les a vus arriver tous les deux, il s’est souvenu de son musicien et quand ils les a vus sentir l’intérieur des voitures il a su qu’il pourrait enfin vendre cette vieille Plymouth.

Il pourrait la vendre sans crainte, il respecterait sa promesse. Il est un peu superstitieux et chaque fois qu’il fait le tour de son parc, et qu’il s’approche de la carrosserie verdâtre il ne peut s’’empêcher de revoir le visage raviné du musicien qui ne voulait plus rouler dans cette carcasse récalcitrante.

Il leur explique qu’ils ne pourront pas en attendre grand-chose ; il explique qu’elle est solide, mais pas nerveuse il ne vaut mieux pas l’utiliser sur de petites routes sinueuses parce qu’évidemment elle n’a pas de direction assistée.

Peu importe, ce qu’ils veulent tous les deux c’est prendre la route, et aller le plus droit possible.

Ils expliquent. Ce qu’ils veulent, c’est rouler en se relayant pendant plus de 37 heures, c’est le cadeau qu’ils ont décidé de se faire, un cadeau dont ils sont à peu près les seuls à comprendre le sens.

Pourquoi trente-sept heures ? Parce que c’est à quelques minutes près la durée compilée de tous les disques de leur maître, de leur idole commune, de leur compagnon de rêveries de celui qui aurait pu conduire lui aussi cette voiture celui que les autres appellent le Boss.

Ils ont décidé simplement de s’offrir un voyage en voiture avec comme fonds musical tout ce que Bruce Springsteen a écrit, chanté, joué, simplement sur un lecteur de CD assez simple avec des vrais boutons qui tournent.

Au début ils avaient simplement décidé qu’il faudrait qu’ils fassent quelque chose, ensemble, autour de cette passion commune. Ils peuvent, ils s’en sont  souvenus l’un comme l’autre recevoir des bouquets d’émotions à l’écoute de  ces mélodies, avec pour envelopper la voix rauque, parfois plaintive de Bruce, le ronronnement d’un moteur et le glissement des essuie- glaces.

La moitié et son double : 3

Le père n’est pas musicien, ne comprend pas grand-chose à l’anglais, mais ce qu’il aime avec ce chanteur c’est que tout devient simple. La musique, elle lui entre dans la tête sans poser de questions, sans chercher à se faire remarquer, sans chercher à ce qu’on prenne l’air sérieux pour en comprendre les portées.

Cette musique, surtout les morceaux acoustiques, on sent qu’elle est faite pour ceux qui n’obligent pas leurs émotions à prendre d’autres chemins que ceux qu’elles sont habituées à emprunter. Ce sont les mêmes chemins qu’à la lecture d’un passage de Steinbeck, de Camus, de Kerouac, ou d’Hemingway. Les paroles il ne les comprend pas toutes, contrairement à son fils qui est à l’aise avec l’anglais. Il ne les comprend pas toutes mais il les ressent, il sait qu’elles parlent, pour beaucoup d’entre elles, de ce qui est vrai.

Le fils lui connaît tout de ce chanteur, il est un passionné, pas un fan ; le mot ne convient pas pour décrire ce qui se passe chez lui quand il a les tripes secouées lors des nombreux concerts auxquels il a assisté. On parle de fans pour les autres, ceux qui reçoivent paroles et musiques avec passivité, comme des oies qu’on gave, lui il n’a pas la bouche ouverte, il laisse entrer les émotions, il les laisse naviguer dans l’arrière-pays de sa tête, alors elle rencontre ses autres passions, ses révoltes, ses indignations, ses doutes et ce qui se passe c’est plus que du plaisir, c’est autre chose. Les mots n’existent pas toujours pour décrire quand on sent un frisson qui parcourt l’échine, avec des picotements sur tout le corps et irrésistiblement des larmes qui montent, de ces larmes qu’on ne cherche pas à ravaler parce qu’elles sont le sang de cette vie qu’on a en soi, une vie qu’on ne retient pas, une vie qu’on laisse dire, qu’on laisse faire.

Le père il comprend bien cela, il éprouve aussi ces sensations quand il lit les premières pages de l’étranger, quand il lit et entend ce que dit Léo Ferré. Et lui non plus n’est fan de rien, parce que lui non plus n’aime pas cette réduction du fanatisme. Tous les deux ce qu’ils aiment par-dessus tout, c’est la vie, ses contrastes, ses simplicités, ce qu’ils redoutent, ce qu’ils ne supportent pas, c’est les fausses certitudes de celles et ceux qui prétendent savoir.

La moitié et son double, 2

Street Art sur le mur de Berlin

Il se souvient de cet homme. Il lui a proposé d’entrer avec lui, à l’intérieur, de s’asseoir doucement, d’écouter la portière qui claque, le craquement du mauvais cuir quand on s’assoit. Il lui a conseillé de fermer les yeux et d’attendre, d’entendre. Il  l’a pris pour un malade, pour  un original,  mais il est quand même entré. Il a fermé les yeux, vite, parce qu’il était pressé, et c’est vrai il s’en souvient : il était bien. Il pleuvait légèrement et les gouttes de pluie faisaient comme une mélodie, une espèce de mélancolie qui rappelle tant le blues qui navigue toujours entre le rire et les larmes.

Alors quand il les a vus arriver tous les deux, il s’est souvenu de son musicien et quand ils les a vus sentir l’intérieur des voitures il a su qu’il pourrait enfin vendre cette vieille Plymouth.

Il pourrait la vendre sans crainte, il respecterait sa promesse. Il est un peu superstitieux et chaque fois qu’il fait le tour de son parc, et qu’il s’approche de la carrosserie verdâtre il ne peut s’’empêcher de revoir le visage raviné du musicien qui ne voulait plus rouler dans cette carcasse récalcitrante.

Il leur explique qu’ils ne pourront pas en attendre grand-chose ; il explique qu’elle est solide, mais pas nerveuse il ne vaut mieux pas l’utiliser sur de petites routes sinueuses parce qu’évidemment elle n’a pas de direction assistée.

Peu importe, ce qu’ils veulent tous les deux c’est prendre la route, et aller le plus droit possible.

Ils expliquent. Ce qu’ils veulent, c’est rouler en se relayant pendant plus de 37 heures, c’est le cadeau qu’ils ont décidé de se faire, un cadeau dont ils sont à peu près les seuls à comprendre le sens.

Pourquoi trente-sept heures ? Parce que c’est à quelques minutes près la durée compilée de tous les disques de leur maître, de leur idole commune, de leur compagnon de rêveries de celui qui aurait pu conduire lui aussi cette voiture celui que les autres appellent le Boss.

Ils ont décidé simplement de s’offrir un voyage en voiture avec comme fonds musical tout ce que Bruce Springsteen a écrit, chanté, joué, simplement sur un lecteur de CD assez simple avec des vrais boutons qui tournent.

Au début ils avaient simplement décidé qu’il faudrait qu’ils fassent quelque chose, ensemble, autour de cette passion commune. Ils peuvent, ils s’en sont  souvenus l’un comme l’autre recevoir des bouquets d’émotions à l’écoute de  ces mélodies, avec pour envelopper la voix rauque, parfois plaintive de Bruce, le ronronnement d’un moteur et le glissement des essuie- glaces.