
Lucie a décidé de reprendre une activité militante au sein de l’organisme de loisirs qui organise les colonies où elle envoie ses enfants. C’est ainsi. Chaque année à la rentrée, elle prend une série de résolutions, bonnes ou mauvaises, qu’elle va s’efforcer de respecter tout au long de cette période léthargique. Puis, l’été suivant elle en négligera quelques unes à la faveur d’un ensoleillement propice aux amnésies temporaires.
Cette année, c’est différent, il ne s’agit pas de sport ou de se lancer dans l’apprentissage de la guitare ou du bouzouki. Non cette année il s’agit de renouer avec ses premiers amours, ceux de l’éducation globale et permanente…
Vaste programme ! Mais Lucie est une experte. Elle a participé à tant de regroupements , de colloques, de stages dans une de ses nombreuses jeunesses, qu’elle n’aura aucune difficulté à se remettre à niveau. Ce dont elle a envie, c’est reprendre du service comme formatrice d’animateurs. C’est lorsque ses enfants sont revenus de colonie cette année que l’envie s’est faite plus pressante.
De plus, cet été, elle est intervenue, bénévolement, dans la colonie des plus petits. Trois animateurs étaient malades et comme on ne trouvait personne pour les remplacer, le directeur, un ancien ami a pensé à elle. Ce fut une semaine extraordinaire pour Lucie. Elle n’avait rien perdu de ses réflexes, et lorsqu’elle était rentrée, elle avait annoncé à Marc son intention de reprendre du service. Celui ci s’était montré sceptique. Il avait trouvé suspect ce besoin pressant de renouer avec de vieilles passions. La présence de Jean Paul n’était certainement pas étrangère à ce désir de militer pour le bonheur de l’enfance et de l’adolescence.
Marc était jaloux et Lucie aimait en jouer. Il y avait là matière à fabriquer quelques nuits d’angoisses.
Son activité militante consisterait à participer à un groupe de réflexion animé par Jean Paul, sur le thème de l’enfant et les nouvelles technologies. Ce n’était pas tant le thème qui la passionnait, mais il y avait Jean Paul. Participait aussi un des animateurs de la colonie Internet d’Armand. Cela lui permettrait de parler de son fils, de son comportement à l’extérieur. Il n’était pas au courant et avait préféré ne rien dire, persuadée qu’il n’apprécierait pas ce moyen détourné de mener une enquête le concernant. Pour elle, c’était en quelque sorte joindre l’utile à l’agréable. Elle pourrait se déculpabiliser, et ne pas se reprocher de passer quelques soirées hors du foyer.
C’était un peu pour son fils, pour ses enfants, pour la famille qu’elle donnerait un peu de son temps… Si tout se passait bien, si elle retrouvait la fibre, si Marc ne mettait pas son mauvais esprit au travers de sa route, elle pourrait encadrer une session de formation d’animateurs pendant les vacances de la Toussaint. Sur le thème d’Internet, comme ça elle aussi, elle pourrait accompagner Armand dans le fameux cybermonde…